A Aubignas, le 30 Avril 2020
Il a suffi d’une nuit et de quelques flocons de neige, et les gelées de fin mars ont été fatales à beaucoup de parcelles de cépages précoces. C’est un coup dur pour les vignerons du coin qui ont vu une partie de leur production s’envoler en l’espace de quelques heures. A Alba et Aubignas, c’est les Chardonnay qui ont beaucoup souffert. Il faut dire que le mois de Février avait été très printanier et que toute la végétation s’était lancée.
Pour nous, l’heure est aux commandes de raisins. Il faut trouver les quantités suffisantes et les réserver pour les vendanges de septembre. Nous sommes à la recherche d’une quinzaine de tonnes, dans l’espoir de faire 15 000 bouteilles cette année. Aujourd’hui, nous n’avons pas le luxe de choisir les cépages que nous achetons. Les plus recherchés étant réservés d’avance par les vignerons déjà en place. Antonin Azzoni, encore une fois, assure nos arrières, et nous prévoyons grâce à lui de récupérer 8 tonnes de Gamay et de Merlot provenant de chez Jean-Benoit Plagnol, viticulteur au dessus des Vans, à qui nous avions acheté les raisins d’Elle Tremble.
Nous poursuivons donc nos recherches actives dans la région pour atteindre notre objectif. Il faut trouver un vigneron qui travaille en bio et vendange à la main, avec un terroir intéressant et des rendements peu élevés. Nous avons quelques pistes pour du Grenache blanc, du Viognier, du Chatus et du Caladoc…
En cave, Elle Tremble est prête. Les fermentations sont finies. Nous avons profité du confinement pour laisser le vin s’épanouir un peu plus que prévu dans les vieux fûts de chêne. Nous les avons finalement décuvés pour les assembler à la cuve inox Méliès. Ensemble, ils se retrouvent dans Lumière et apprendront à se connaitre pendant 1 mois avant une mise en bouteille prévue le 30 Mai (lune descendante et jour fruit…). Le vin sera prêt à être expédié peu après. Espérons que le reste pourra suivre.
Pour la mise, nous sommes parés. Le visage d’Elle Tremble a été dessiné par Gilles Perdu. Nous avons reçu les étiquettes, les cartons, les bouchons, les capsules, etc.
Aussi, les commandes de cuves pour accueillir le raisin en Septembre, et de matériel nécessaire à la vinification sont lancées. Avant de recevoir tout ça, il nous faut préparer le terrain. Soit, dans un premier temps, isoler le chai dans le but de contrôler au mieux les températures pendant les fermentations. Nous avançons doucement mais surement et devrions avoir terminé ce chantier d’ici quelques semaines. Ensuite il s’agira de refaire le sol, de mettre en place un réseau d’eau de refroidissement pour contrôler les températures des cuves, et enfin de dépoussiérer le réseau électrique…
Pendant ce temps, la nature explose littéralement depuis le début du printemps. Les couleurs changent et évoluent chaque jour. C’est un spectacle unique et nous mesurons notre chance d’en être les témoins en ces temps si difficiles. L’atmosphère est calme. Sur la parcelle, le sainfoin pousse et fait naître des petites fleurs roses qui vont bientôt envahir nos 2 hectares.
Nous allons, dans les jours qui viennent, pour la première fois opérer une préparation biodynamique de bouse de corne. Il s’agit de pulvériser une dose homéopathique de bouse de vache fermentée pendant l’hiver (200g dilués dans 60L d’eau) sur la parcelle pour signaler aux plantes le changement de cycle et le passage d’une période tournée vers la terre à une période de croissance tournée vers le ciel. Nous sommes totalement novices dans ces techniques et ces concepts. Il nous arrivent d’être très surpris par des protocoles alambiqués. Mais les vins faits dans ces conditions nous ont souvent plu. Et surtout cela nous force à observer plus précisément notre environnement, à être plus attentionné.
Les amandiers, eux, ont été les premiers à fleurir. Nous avons, comme prévu, essuyé des pertes mais une majorité semble repartir. Pour le travail des sols de ces parcelles de fruitiers nous attendons la livraison imminente d’un tracteur, un magnifique Massey Ferguson 364V rouge de 1995, que nous avons acheté à plusieurs actionnaires. Merci à eux.
Concernant les ventes de Elle Tremble, la situation actuelle a profondément rebattu les cartes. La première moitié de notre production, qui avait été réservée par différents importateurs, est en stand bye. Les salons ont été annulés. Et les principaux lieux de vente de vin restent fermés.
Néanmoins, avec toutes les commandes de particuliers et si les importateurs confirment leur demande, nous avons tout vendu. Nous avons tout de même gardé un petit stock pour aller démarcher les restaurants, cavistes, bars locaux dès que nous le pourrons.

