A Aubignas, le 19 octobre 2020
Nous savions que nous ne serions pas épargnés par le réchauffement climatique en Ardèche. Mais nous nous sommes pourtant laissés surprendre par le début extrêmement précoce de la campagne de 2020.
Tôt le 15 Août donc, sur les pentes surplombant le village d’Alba la Romaine, nous avons récolté les premiers raisins. Chardonnay. 937 Kg de petites baies dorées. La veille, jusque tard dans la nuit, nous étions encore en train de travailler sur le pressoir que nous avons rénové cet été. Nous l’avons baptisé dans la journée. Le foulage a été une fête. Un jus aux arômes de poire, de pêche et de fenouil s’est écoulé et est venu remplir Jane.
Puis, petit à petit, jusqu’au 8 septembre, nous sommes allés chercher des Merlot et des Gamay aux Sallèles, chez Armelle et Jean-Benoit Plagnol. Des Grenaches et des Cabernet Sauvignon à Lagorce, chez les frères Ozil et chez Didier Cazak. Ainsi que des Carignan à Valvignières, chez Gérald Oustric. Nous avons récolté en tout 17 tonnes de raisins. Soit pas mal plus que ce que nous avions prévu…
2019 avait été une année de sécheresse exceptionnelle, avec des petits rendements et des raisins très concentrés. Cette année, grâce à des conditions moins extrêmes, la vigne a compensé et donc été plus généreuse. Chez chaque vigneron avec lesquels nous avons travaillé, nous avions la possibilité de prendre plus de raisins que la commande initiale. Nous ne nous sommes pas privés.
Les vendanges ont été intenses pour les néophytes que nous sommes. Malgré nos erreurs, elles ont été festives. Nos jus sont issus de nombreux coups de mains.
C’est tôt le matin que nous partions vendanger. Nous tâchions de quitter les parcelles pas trop tard, lorsque le soleil n’était pas encore trop haut, afin que les grappes restent le plus frais possible. La température des raisins lorsqu’ils entrent en cave, (particulièrement au mois d’Août), est primordiale si l’on veut travailler en finesse.
Nous arrivions au chai en milieu de matinée et, en fonction des cépages et de la direction vers laquelle nous imaginions les diriger, nous choisissions notre mode de vinification: macération carbonique (grappes entières en cuves) pour du fruit et de la souplesse, égrapages pour apporter de la structure, infusions (raisins qui macèrent dans des presses directes) pour des protocoles moins classiques.
Une fois les raisins en cuve, nous les avons goûtés et analysés (densité et température) plusieurs fois par jour. Il faut être au plus près d’eux pour apprendre à les connaître et à capter leurs dynamiques, et ainsi comprendre quand travailler dessus s’il le faut.
Comme on pouvait s’y attendre, les premières cuves ont eu quelques difficultés en début de fermentation. Travaillant en levures indigènes et notre cave étant vierge de toute fermentation alcoolique au préalable, les levures qui ont pris le milieu en premier n’étaient pas forcément celles que l’on désirait. Les jus ont subi une légère réduction, et ont produit de l’acétate. L’acétate, c’est une odeur de colle scotch, ou de vernis à ongle, rien de très glamour pour le vin, mais rien d’irréversible à ce stade. Le but étant alors d’oxygéner le vin, notamment grâce à des remontages, pour ainsi favoriser le développement des « bons » types de levures, qui effectueront la plus grosse partie de la fermentation alcoolique.
C’est ce qui a été fait dans toutes les cuves. Et on peut se féliciter d’avoir terminé toutes nos fermentations, calmement, dès fin septembre (l’année dernière, elles avaient couru jusqu’au mois d’avril…).
Nous ne remercierons jamais assez nos amis Gilles et Antonin Azzoni, qui ont été présents et ont répondu à nos appels quand nous doutions. Cette entraide en Ardèche entre les vignerons est précieuse et rare. Leur générosité dans cette transmission des savoirs est un pilier de notre apprentissage et de notre nouvelle vie.
Aujourd’hui, passée l’euphorie des vendanges puis des vinifications, place à l’élevage. C’est une énergie très différente. Il faut savoir observer des dynamiques plus lentes, et surtout apprendre à ne rien faire! Tous nos vins se mettent petit à petit en place dans leurs cuves ou dans leurs fûts. Nous avons choisi de garder pour le moment chaque cépage, chaque parcelle indépendante. Viendra rapidement le temps des assemblages, sur lesquels nous nous posons encore beaucoup de questions.
Pour le moment, nous sommes très heureux des histoires et des voyages que nous proposent nos vins de 2020. Et sommes impatients de vous faire goûter les notes de confiture de cassis et de réglisse d’Elle Tremble, qui nous semble déjà prête. Elle sera comme l’année dernière 100% Merlot, mais issue de plus vieilles vignes. Nous pensons la mettre en bouteilles dès janvier. Elle sera probablement accompagnée d’un rosé, Dans la vignes électrique. Pour le reste (Gamay, Grenache/Carignan, Chardonnay…), il faudra attendre quelques mois de plus.
Dans quelques jours, nous récolterons pour la première fois nos olives. Elles sont absolument magnifiques cette année. On a l’opportunité de les presser indépendamment dans un moulin chez un oléiculteur du coin, et d’ainsi avoir notre propre huile d’olive bio! Quelle chance !
Nous commençons également à nous préparer sérieusement pour les plantations du printemps. Il s’agit de cartographier notre future parcelle, et de tracer sur place les futurs rangs de vigne. A priori, les jeunes plants arriveront courant Mars.
Enfin, nous espérons participer à des salons en début d’année prochaine (Montpellier, Angers, Paris, Sète…), et ainsi pouvoir tous vous croiser autour d’un canon.




